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"Si
tu ne désensables pas ta vie chaque jour..." |
«Un homme raconte son histoire, et ce sera celle
de tous et de personne» : cette édition
originale des premières années du Journal
de Henri Thomas, qui vont de 1934 — fin de son adolescence
sensible et imaginative, jusqu’au lendemain de la
mort d’Antonin Artaud —, a été établie
par sa fille, Nathalie Thomas, préfacée
par Jérôme Prieur et annotée par
Luc Autret.
ils d’un paysan vosgien, mort des suites de la grande
guerre, et d’une institutrice, Henri Thomas se distingua
dès
le lycée par un premier prix de philosophie au
Concours général de 1931. Un jour, il paria
avec ses camarades du collège de Saint-Dié qu’André
Gide lui-même répondrait à l’envoi
de ses vers : Gide répondit et l’encouragea
à lui téléphoner à Paris, dès
son baccalauréat en poche…
Thomas fit sa khâgne à Henri-IV, où
il eut comme professeur Alain ; tiraillé entre l’influence
de son «maître» et celle de Gide, il se
réfugia dans la lecture puis renonça, en 1934,
à Normale comme à l’agrégation.
Son compatriote Arthur Rimbaud lui avait insufflé
une sourde révolte, toute entière reversée
en poésie… Vinrent l’expérience
ratée de la Guerre d’Espagne, le long service
militaire en Moselle, les premières publications
de poèmes, les travaux alimentaires confiés
au jeune homme impécunieux (Le Précepteur,
1942). Introduit dans le milieu de la NRF, il publia
un récit autobiographique, Le Seau à charbon en avril 1940, alors qu’il était aux armées.
Le livre fut peu remarqué. «Il faudra savoir
tirer parti au plus juste de mon mince bagage, au retour
dans la vie civile. Peu d’argent, de rares possibilités
de travail rémunéré, une énergie
assez grande mais sujette à quantité de faux-pas»
nota-t-il dans ses Carnets donnés à lire à
Gide, qui en apprécia l’écriture «déjà
pleine d’une riche substance».
Après la Démobilisation, il vécut
dans une chambre de bonne prêtée par Gide,
rue Vaneau : il s’exerça à la critique
littéraire
et publia des recueils de poèmes (Travaux d’aveugle,
1941) et des textes dans La Nouvelle Revue française,
alors sous la direction de Drieu La Rochelle. Il s’arracha
à ce mol inconfort, franchit la ligne de Démarcation
et se réfugia à Cabris au sein de la petite
communauté regroupée autour d’André
Gide, des Van Rysselberghe et des Mayrisch (Le Goût
de l’éternel, 1990). Après avoir
failli épouser Catherine Gide, «le petit
Thomas» se maria avec une jeune étudiante
en philosophie, Colette Gibert, et commença
un livre au titre ironique, La Vie ensemble (1945)…
À la Libération, Henri Thomas devint secrétaire
littéraire de l’hebdomadaire Terre des
Hommes, dirigé par Pierre Herbart ; il aida
Arthur Adamov à lancer sa revue L’Heure
nouvelle et fonda en 1947,
avec Marcel Bisiaux, la revue 84, qui
réunit, cinq années durant, Alfred Kern,
André Dhotel, Georges
Lambrichs,
Pierre Leyris et Jacques Brenner. Puis, ce fut la longue
et douloureuse rupture avec Colette, qui, depuis leur visite
à Antonin Artaud à Rodez en 1946, était
devenue «l’une des filles de son délire»
(elle est la «Lucie» éperdue du roman
de Henri Thomas, le Migrateur,
1983)… 1948 fut, pour le jeune écrivain l’année
du départ volontariste pour les «hivers
charbonneux» de Londres, où il devint
traducteur à la BBC.
Après un certain effort d’intégration
sociale en Angleterre et son remariage avec Jacqueline
Le Béguec, qui devait mourir en 1965, il enseigna
la littérature française à l’université
Brandeis (Massachussets) aux États-Unis, de 1958
à 1960. C’est dans la société
américaine qu’il trouva l’inquiétant
sujet du roman qui le fit connaître : John Perkins
obtint le prix Médicis en 1960. L’année
suivante, Le Promontoire eut le prix Fémina…
Henri Thomas revint gagner sa vie en France, appointé
comme lecteur des manuscrits de littérature allemande
chez Gallimard — où il publia quasiment tous
ses livres jusqu’à la fin de sa vie, en
regrettant cependant qu’ils ne fussent point discutés
en comité, mais acceptés d’emblée…
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• 40
illustrations, photographies, fac-similés en couleurs
et 8 en n. & bl.
• 21, 5 x 13 cm. 720 pages. Isbn : 978-2-912222-27-5.
• Prix de vente public : 51 €
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